Des MOTS
Parce que, parfois, ÉCRIRE me délivre, j'échange les maux et leurs douleurs contre des mots doux en couleurs...
Dans ce texte, j'exprime mon ressenti face à la maladie d'Alzheimer dont souffre ma maman.
« Le Sablier »
Le rouge sur ses ongles, voilà comment elle était. Toujours bien coiffée, à peine maquillée, soigneusement apprêtée.
Car c'est important la présentation ! Sinon, que vont dire les gens ? Qu'en dira-t-on ?
Elle était coquette, avant. Comme l'était sa maman, il y a fort longtemps.
Le sablier de sa mémoire se vide, lentement. Grain après grain, le Passé s'invite dans son Présent.
Elle rêve sa vie comme une illusion. Avec certitudes et convictions, jusqu'à en perdre la raison. Impossible d'objecter. Impossible d'y remédier.
Dans mes rêves, j'ai 3 ans et nous nous promenons au parc. J'aime respirer le doux parfum des fleurs en tenant la main de ma maman. Dans tes rêves, parfois, j'ai 25 ans et je ne suis pas encore maman.
Nos voix et tes souvenirs ne s'accordent plus au diapason. Chaque jour, tu voyages dans l'ascenseur des émotions.
À chaque étage une rencontre !
Au sommet, la Fée Douceur qui te comble de bonheur quand elle t'entoure de ta famille. Et aux tréfonds de tes angoisses, le Loup Gris qui t'attire sur le Pont de l'Oubli. À cause de lui les visages et les lieux deviennent flous…. Et tu te noies dans un flot de questions.
Alors, au bord du vide, tu t'accroches à celui qui partage ta vie depuis bientôt soixante ans. Ton bien-aimé, ton mari, ton référent. Tout va bien Maman. Papa est là pour toi. Il prend soin de toi.
Le sablier de sa mémoire se ride, délicatement. Grain après grain, le Passé sillonne son Présent.
Trois fois j'ai vu les lumières traverser le spectre de sa mémoire. Comme un éclair de lucidité, une brève prise de conscience de la dure réalité. Et dans ses yeux alors brillent les gouttes du désespoir.
Tu nous dévoiles un peu plus chaque jour, ce que l'humain s'évertue à cacher… Faiblesses et vulnérabilité.
Tes mots n'ont plus de filtre. De nouveaux maux s'infiltrent. Tu dis ce que tu penses et tu penses ce que tu dis ! Sans arrière-pensée, sans intention de blesser.
Tu perds le fil de ta vie en regardant l'étoile filer dans la nuit. Tu ne parviens plus à défaire les nœuds de tes mouchoirs et dans la confusion, tu creuses encore les trous de ta mémoire.
Dans tes rêves, tu fais tes bagages pour partir en voyage, avec tes enfants.
Dans mes rêves… Je ne rêve plus d'avant, Maman. Je préfère profiter de l'instant.
Et lorsque tu me dis « vous », en t'excusant d'avoir oublié mon prénom, cette petite maladresse me rappelle que le mal progresse…
Pourtant rien ne presse ! On pourrait essayer de prendre l'escalier. Avancer au ralenti sur le tapis de la Vie et oublier pendant un temps la maladie.
Tu me préparerais mon plat préféré, en récitant la recette au gramme prés. Tu reconnaîtrais chaque visage sur chaque image et tu encouragerais tes petits-enfants, devenus grands, à réussir dans tous leurs projets.
Je te tiendrais la main Maman. On marcherait ensemble, sur le chemin rouge flamboyant des feuilles d'automne que nous aimons tant.
J'ai le droit de rêver finalement. Rien ne presse ? Et pourtant…
Le sablier de sa
mémoire se vide, inexorablement. Trop de grains sont passés à présent.
Ma première participation à un concours d'écriture / Association Gens du Monde / thème "Dans tes rêves" 2023
ElémenTERRE
De l'Eau ? Il en faut. Quelques gouttes ou bien des flots.
Il y a de l'Eau dans l'Air ! Et quand ça tombe sur la Terre, ça devient tout vert !
De l'Eau, il en faut. Oui, mais pas trop ! Sinon la Terre a les nerfs, ça déborde et tout est parterre !
Le Feu ? C'est précieux. Dans un crépitement silencieux, il réchauffe et illumine les lieux.
De l'Air ? C'est nécessaire ! Et un grand bol, c'est souvent salutaire…
Mais l'Air de rien, trop d'Air déchaine le Feu et embrase la Terre.
Alors, de l'Eau, il en faut…